Comment gérer les agressions homophobes ?
par Shoryuken le 15 Octobre 2008 dans Humour / Guide de la Vie Gay
Les singes savants de l’Insee vous prodiguent leurs précieux conseils pour bien réagir face aux agressions homophobes.
Bienheureux, le pédégouine qui n’a jamais été confronté à une attaque homophobe ! Bienheureux celui qui ne s’est jamais fait traiter de sale tarlouze ou de pauvre gouinasse. Bienheureux, enfin, celui qui n’a jamais essuyé les coups et les crachats parce qu’il n’est pas hétéro. Pour tous les autres, meurtris dans leur chair par le fer porté à blanc de la haine ordinaire, il existe tout un tas de méthodes pour lutter contre l’homophobie. A vous de choisir celle qui vous plaira…
I : La mode peut vous sauver la vie !
C’est une belle journée et, contrairement à Mylène, je n’ai pas décidé d’aller me coucher. Je préfère déambuler dans les rues de ma ville avec mon chéri, main dans la main. Les gens se retournent parfois sur notre passage – sans nul doute pour admirer notre incroyable beauté. Certains sont béats, d’autres nous font des clins d’œil et d’autres encore se gaussent. Mais je vis un amour tel que rien ne peut l’entacher. Enfin, presque rien. Car nous croisons bientôt un rare spécimen d’hétérobeaufus primérus. Celui-ci, avec la finesse qui le caractérise, nous assène de sa voix de Stentor un très recherché : "sales pédés, faudrait tous vous tuer !" Mon ami et moi restons interdits par tant de véhémence à notre égard. Nous nous regardons et décidons tacitement de poursuivre notre chemin, signifiant ainsi au rustre que nous n’avons que faire de ses insultes. Le sagouin ne l’entend hélas pas de cette oreille et, bien décidé à casser du pédé, se met en travers de notre route, le poing levé, les yeux injectés de sang et l’écume aux lèvres.
Ceux qui me connaissent savent que je suis chétif. Une vraie petite crevette. Et mon copain est à peine moins fluet que moi. Nous ne pouvons donc pas nous battre contre la montagne de muscles et de rage qui se tient devant nous. Même dix comme nous ne lui ferait pas une égratignure ! Heureusement mon tendre ami est plein de ressources. Toujours à la pointe de la mode, il fait partie de ces hommes qui portent fièrement un sac à main. Dans le sien, entre le dernier Pref et trois boîtes de préservatifs, il a glissé un solide parpaing. Il se saisit donc de son sac Gucci et l’envoie violemment dans le ventre plein de bière du butor. Celui-ci s’écroule de toute sa masse sur le macadam, psychologiquement et littéralement ulcéré d’avoir été mis à mal par une tapette. Tandis que j’embrasse à pleine bouche mon héros, je lance un regard à la loque qui gît à nos pieds : à mon avis, elle réfléchira à deux fois avant d’agresser une nouvelle fois un homo !
Que les filles qui aiment les filles se rassurent : il existe une variante plus raffinée pour elles. Prada a sorti dernièrement une clé à molette de 54. Ce charmant et discret bijou se porte autour du cou, comme n’importe quel pendentif. Sa finition rouge et or ravira les nombreuses fans du Racing Club de Lens ainsi que les amatrices de bon goût. Son utilisation est simple. Tandis que le lesbophobe qui est en face de vous débite sa logorrhée d’insultes, détournez son attention en lui racontant une blague juive ( elles font rire tout le monde ! ) puis, subrepticement, détachez la clé de votre cou. Saisissez-la à deux mains et, d’un coup rapide et précis, visez l’entrejambe du malotru. L’ennemi une fois à terre, les mains tendus sur ses défuntes parties et implorant sa maman, il ne vous restera plus qu’à sortir un bon mot, comme Sandra Bullock dans Demolition Man.
Dernier accessoire qui peut vous sauver la vie : l’escarpin. Riez, oui, riez ! Mais ne sous-estimez pas le pouvoir dévastateur de cette chaussure en apparence inoffensive. Ses couleurs chatoyantes, la brillance de son vernis, la minceur des lanières et le petit pompon tromignon ne sont là que pour mieux détourner les soupçons. Car qui pourrait imaginer la douleur provoquée par l’enfoncement dans les métatarses de 18 bons centimètres de métal froid et acéré ? Hein, qui ? Là encore, l’utilisation est simple. Le pédéphobe étant débile par nature, il suffit là encore de détourner son attention ( montrez-lui par exemple la lune, mais ne vos étonnez pas s’il regarde votre doigt ) et de planter d’un coup sec votre talon dans l’un de ses pieds. Un cri horrible retentira et, par reflexe psycho-morphologique, le gougnafier se mettra à sautiller à cloche-pied sur place tout en vomissant des insultes. Profitez-en alors pour fuir, non sans avoir pris la précaution d’ôter vos escarpins – il serait stupide que vous tombiez, ce qui permettrait à votre adversaire de vous shlagguer laggle.
Donc, amis pédégouines, n’oubliez jamais que de basiques accessoires de mode intelligemment utilisés peuvent vous sauver la mise !
II : La self défense, c’est funky !
Si l’idée de faire les boutiques vous rebute et que vous n'êtes carrément pas fashion, posez-vous deux questions. La première, cruciale : suis-je vraiment pédé ? La seconde, tout aussi importante, surtout dans le cas qui nous intéresse : ne ferais-je pas mieux de m’inscrire dans un dojo et de suivre des cours de self défense ? La réponse à cette question est oui ! Indubitablement ! Et pour deux raisons.
La première, toute simple, c’est qu’apprendre à se défendre est très utile en ces temps d’insécurité. Croyez-moi, personne ne viendra plus vous traiter d’enculé quand vous serez capable d’enchaîner un shinku-hadoken et un tatsumaki sempu kyaku ! En plus, savoir se battre, c’est cool et ça vous permettra de défendre d’autres pédégouines qui ne manqueront pas de tomber sous votre charme une fois sauvés ! La classe version George Abitbol !
La seconde raison, c’est que les dojos, c’est toujours bourré de beaux mecs et de belles nanas ! Qui n’a jamais fantasmé de se faire kami shio gatame par un grand gaillard musclé et transpirant à grosses goutes ? Qui n’a jamais désiré expérimenter un petit okuri eri kime sur une donzelle dont le généreux corsage serait mis en valeur par un kimono aussi blanc que moulant ?
III : Toujours être bien accompagné[e] !
Le pédé est un animal très sociable qui aime voir du monde. C’est pourquoi il sort beaucoup - souvent la nuit - et fréquente des endroits plus exposés au danger que la moyenne ( clubs, lieux de passes, ruelles sombres où l’on deal de la drogue ). De facto, il est plus sujet aux agressions que le type lambda. C’est donc une raison supplémentaire de savoir réagir face aux agressions. Ici, les singes savants vous conseillent de bien choisir votre entourage.
L’idéal serait de sortir – au propre comme au figuré – avec un membre des forces de polices. En effet, rares sont ceux qui oseraient sciemment s’attaquer à un agent de l’ordre et à son entourage. Outre le fait de se savoir protégé par un professionnel, ce qu’il y a de vraiment génial dans cette idée, c’est tout le côté funky de l’uniforme ( fantasme quand tu nous tiens ! ).
Si vous préférez l’exotisme et l’ébène, vous pouvez toujours sortir avec le videur du Macumba que vous fréquentez assidument. Après tout, depuis le temps que vous le voyez, c’est comme si vous le connaissiez. Et puis il faut dire ce qui est : là non plus, personne ne va emmerder un mec qui fait deux mètres de haut pour 120 kilos de muscles. Même si le dit monsieur arrondit ses fins de mois dans des gogo-bars en se déhanchant sur de la musique d’ascenseur simplement vêtu d’un string rouge à paillettes qui le rend totalement ridicule. Non, même là, personne ne va l’emmerder. On préfère taper sur les pauvres petites pédales minces et sans défense comme moi.
Dernier ami, et pas des moindres : le rottweiler. Si si ! Comme le dit l’adage, "si tu veux de l’amour, prends un chien". Le rottweiler, donc, peut s’avérer être votre meilleur compagnon et un bouclier plus que dissuasif contre les casseurs de pédés. Songez-y !
IV : Gérer les cas pratiques !
Vous vous dites que tout ceci n’est que théorique. Vous avez tort : chaque conseil a été testé, analysé et validé par le haut comité des singes savants. Vous-voulez néanmoins savoir comment faire face à l’homophobie dans des cas pratiques ? Pas de problème !
Commençons avec du classique : le couple de vieux.
Vous êtes dans le square municipal, toi et ton copain / ta copine à profiter de l’air frais et du soleil. Vous vous bécotez sur le banc public où tu as gravé au couteau suisse « Je t’aimerai toujours, Brendon / Brenda ». C’est mignon à l’overdose. Mais pas du goût de tout le monde. Et surtout pas de celui de Raoul et Marceline, les vieux râleurs réac’ du quartier. Quand ils passent près de vous et vous voient échanger vos enzymes buccales, ils ne peuvent s’empêcher de vous traiter de sales pédés / goudous. Très franchement, il n’y a pas grand-chose à faire face à eux. Ils sont vieux, ne passeront sans doute pas l’hiver et surtout, ne changeront pas de mentalité. Donc il est inutile de leur rétorquer quoi que ce soit. La meilleure réponse, c’est encore de continuer à vous embrasser. Ca les dégoutera et ils partiront en emportant avec eux leurs regrets sur la France du Maréchal.
Poursuivons avec un fervent adepte de l’homophobie : la racaille – communément appelée « wesh ».
Ta moitié et toi êtes dans le métro. Main dans la main, parce qu’après tout, vous n’avez aucune raison de vous cacher. Mais il y a ce type dérangeant au fond du wagon qui vous regarde avec insistance et dégoût depuis deux stations : c’est un wesh. Vu qu’il a le courage d’un chaton, il attendra que vous descendiez de la rame pour venir vous cracher au visage sa haine des homos.
Là, deux cas de figures.
Premier cas : vous détournez son attention en le complimentant sur ses vêtements. Certes, vous n’avez pas la même conception de la mode et un gouffre vous sépare à ce niveau-là – vous adorez la dernière collection Galliano et connaissez tout de Givenchy tandis qu’il considère Nike comme le summum de la haute couture et Adidas comme le paroxysme de l’élégance. Mais faites un effort et complimentez-le sur sa casquette-bling-bling-trop-staïly-que-tu-veux-la-même, sur l’incroyable pureté du jaune canari de son jogging Lacoste et sur le look génial de ses baskets-tellement-uniques-que-vous-êtes-dix-millions-à-avoir-les-mêmes. Là, flatté, il oubliera que vous n’êtes pas de la même maison et vous demandera si t’as pas une garo, mec. Autrement dit, vous vous serez fait un ami pour la vie !
Second cas : ne vous démontez surtout pas ! Le wesh est un peureux qui dissimule sa frousse sous une épaisse couche d’agressivité aisément crevable. Dès lors que vous lui tenez tête et que vous lui montrez qu’il ne vous intimide pas, vous avez gagné. Inutile cependant de lui expliquer le pourquoi du comment de l’homosexualité, il ne comprendrait pas. Inutile également de s’étaler ou de donner dans le langage de charretier. S’il souhaite vous insulter à haute voix, laissez-le faire : il se rendra ridicule tout seul dans la trame bondée tandis que vous serez déjà loin, perdus dans l’anonymat de la foule.
Terminons avec l’homophobie au travail – incarnée en la personne de Jean-Pierre.
Je ne sais pas si vous avez remarqué mais dès qu’un type vous emmerde au boulot, faut qu’il s’appelle Jean-Pierre ! J’ai rien contre les gens qui s’appellent Jean-Pierre ( ma grand-mère s’appelle comme ça – mémé, si tu me lis, j’te kiff ! ), mais les Jean-Pierre du travail, faut avouer que c’est quand même des chieurs ! Et bien souvent des homophobes. Ils ne manquent jamais une occasion de critiquer tout ce que vous faites en mentionnant lourdement que ça fait pédé. Exemples : tu as une écriture de fille, tu serais pas pédé ? T’as mis une chemise bleu pastel, tu serais pas pédé ? T’as pris une salade à la cantine, tu serais pas pédé ? J’en passe et des pires.
Là encore, il y a plusieurs façons de répondre.
Si vous êtes encore dans le placard qui est dans le fond de la remise à papier au fond du couloir du dernier étage et que vous n’avez pas le courage ou l’envie de lutter contre cet abruti, vous pouvez toujours laisser passer. Mais entendre à longueur de journée des blagues homophobes risque de vous peser sur les nerfs. Dès lors, soit vous faites un CO clair et net, ce qui dissuadera peut-être Jean-Pierre de dire pédé toutes les deux minutes, soit vous abordez avec lui le sujet de façon intelligente et tentez de l’instruire sur le sujet de l’homosexualité. S’il se montre compréhensif, vous aurez remporté une belle victoire ( un peu comme Canard WC ! ).
Dans le cas où vous êtes clairement outé, que le gus le sait et qu’il continue à se montrer toujours aussi con en dépit de vos nombreuses explications sur le sujet, clouez-lui le bec devant les autres collègues. Alors qu’il sort une ixième vanne limite homophobe, posément, dites quelque chose du genre : « ta propension à dire pédé toutes les deux secondes est le signe d’un refoulement certain, chose que me confirme mon gaydar » ou alors « tu faisais moins l’hétéro hier quand on était tous les deux sur la photocopieuse ». Là, le Jean-Pierre fermera son claque-merde tout en rongeant son frein d’avoir été rembarré devant ses collègues. Ceci dit, il n’est pas improbable qu’il se montre peu aimable à votre égard par la suite. Ce qui nous amène au dernier point de ce brillant article.
V : Soutien et autorités compétentes !
Si parmi toutes les méthodes proposées vous n’arrivez pas à choisir celle qui vous convient, vous pouvez recourir à SOS Homophobie, à la police et à la HALDE.
Vivre au quotidien ou de façon régulière des attaques homophobes ( insultes, brimades, coups, menaces… ) fragilise le moral et met en péril la santé de la victime ( physiquement et psychologiquement : malaise, dépression, suicide ). Réagir vite est la seule solution pour ne pas arriver à de regrettables extrêmes. Il existe pour cela différents organismes d’écoute, de soutien et de conseil. Notamment SOS-Homophobie, dont je rappelle ici les deux numéros de téléphone et l’adresse internet :
0 810 108 135
01. 48.06.42.41
www.sos-homophobie.orgEn cas d’agression, ne pas hésiter non plus à porter plainte auprès de la police ou de la gendarmerie. Cette action est gratuite et peut déboucher sur des poursuites – et une condamnation - pénales de l’auteur de l’agression. Je vous laisse l’adresse du site des Services Publiques consacré au dépôt de plaintes :
www.vosdroits.service-public.fr/F1435.xhtmlLa HALDE, enfin. Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité.
Cette autorité administrative indépendante a pour mission d’identifier et de combattre toute pratique discriminatoire tout en accompagnant la victime dans ses démarches. La HALDE intervient dans tous les domaines ( logement, emploi – public et privé… ) et peut être saisie par n’importe qui ( particulier, association ou parlementaire ).
www.halde.frCes services sont gratuits et là pour vous aider. N’hésitez surtout pas à faire appel à eux si le besoin s’en fait sentir !
VII : Conclusion
Etre homosexuel n’est pas une tare, mais dans la société actuelle, cela peut parfois être difficile à vivre. D’aucuns préféreront la voie pacifique et investiront dans une bonne paire de baskets afin de prendre rapidement la fuite lorsqu’une agression homophobe leur tombera dessus. Peut-être auront-ils raison de choisir le chemin tracé par Gandhi et King. Mais qu’ils gardent à l’esprit que désarmer face à la bêtise humaine ne mènera à rien de bon. Ne pas se battre, ne pas réagir face à l’homophobie, c’est la cautionner, nier le droit pour chaque lesbienne et chaque pédé à vivre heureux et en paix au grand jour, comme n’importe quel hétéro.
Lennon disait si justement « Give peace a chance ». Ce à quoi j’ajouterai « but don’t forget your tazer ! »